Etude écologique de la rivière Ternoise Béthune

Jean PEPIN, directeur d’INGREDIA à St Pol-sur-Ternoise

L’étude relative à la qualité écologique de la rivière de la Ternoise est un dossier qui remonte à deux ans. Le cours d’eau présente plusieurs particularités : la présence d’entreprises à proximité de sa source, une station urbaine et une industrie piscicole.
Cette étude écologique a été menée avec la collaboration de l’Agence de l’eau. Le SAGE de la Canche a manifesté sa volonté de reprendre ce dossier qui rentre dans ses compétences. Ce SAGE sera aujourd’hui le représentant pour cette étude.

Qualité écologique de la rivière de la Ternoise

Roger PRUVOST-Valérie CHERIGIE - Patrick VERDEVOYE SAGE Canche - SAGE Canche - DIREN Nord - Pas de Calais

Roger PRUVOST, président du syndicat mixte pour le SAGE Canche

Depuis 2001, la Commission locale de l’eau (CLE) et le syndicat mixte ont été mis en place, et la rédaction d’un Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) a débuté. Il s’agit d’une démarche concertée qui vise à mettre en place la gestion la plus équilibrée possible de la ressource en eau, afin de satisfaire à tous les usages, actuels et futurs.
Cette construction passe par l’élaboration d’une première phase, en cours. Cette phase permet de faire la synthèse des connaissances disponibles, d’émettre un diagnostic, et de donner les premières orientations. Dans ce cadre, la CLE a mis en place quatre groupes de travail thématiques, dont le groupe gestion quantitative et qualitative de la ressource en eau, présidé par Maurice LOUF, maire de Saint Pol sur Ternoise. C’est au cours des travaux de ce groupe qu’une réflexion concernant la Ternoise a été engagée (la Ternoise est l’affluent principal de la Canche). Le but était de définir une action concrète visant à effectuer des relevés et des inventaires pour l’établissement d’un diagnostic précis.
Réalisée en partenariat avec le S3PI, cette étude doit permettre à la CLE d’élaborer un SAGE bien spécifique, ce qui prend en général cinq ans au minimum. Cela permettra de disposer d’une connaissance approfondie de ce linéaire, et amènera à la définition des mesures les plus adaptées pour la production de la ressource en eau et la détermination d’objectifs de qualité. Ces objectifs doivent être le consensus entre le bon état écologique de la rivière de la Ternoise et le maintien des activités socio-économiques. Si chacun participe à ces travaux et fait preuve de bonne volonté, il est possible d’arriver à concilier les différents points de vue.

Valérie CHERIGIE, animatrice du syndicat mixte pour le SAGE Canche

1. Organisation du SAGE
La CLE constitue l’organisme de concertation principal pour le bassin versant de la Canche, et elle a été instituée par le préfet du Pas de Calais le 22 juin 2000. Elle est composée de 60 membres et est présidée par Roger PRUVOST.
La commission permanente de la CLE a été créée le 10 juin 2000 et est composée des membres de trois collèges : le collège des administrations, celui des collectivités territoriales et celui des usagers (monde associatif et monde socioprofessionnel).

Quatre groupes de travail sont présidés par des membres de la CLE et restent ouverts à toute personne qui en fait la demande. Ils sont chargés de la rédaction des documents selon les enjeux du bassin versant :
 le patrimoine piscicole
 les problèmes hydrauliques (inondations sur l’ensemble du bassin)
 la gestion qualitative et quantitative de la ressource en eau
 la valorisation touristique et la communication globale pour le projet de SAGE

La vallée de la Canche est ponctuée de points urbains importants (Le Touquet, Etaples, Montreuil, Hesdin et Saint Pol sur Ternoise). Ce bassin fait partie du bassin hydrographique Artois Picardie, qui atteint une superficie de 1 300 km2 environ et compte 203 communes reprises dans le périmètre défini depuis 1999 par arrêté préfectoral. Certaines communes voient leur territoire superposé sur deux bassins versants, ce qui peut être difficile à gérer.

La CLE, qui pilote le projet global mais n’a pas de pouvoir institutionnel au niveau budgétaire, une structure intercommunale a donc été créée. Le syndicat mixte regroupe les 19 intercommunalités du bassin versant, pour une population d’environ 100 000 habitants, et assure le pilotage opérationnel et décisionnel.

2. Intérêt de l’étude
2.1. Présentation du projet

Le projet a émergé dans les années 1999-2000, suite aux inondations sur la basse vallée (débordement du lit mineur), et au ruissellement et aux coulées de boues (conséquences sur la qualité globale de l’eau).
Les matières en suspension sont l’un des paramètres de la qualité des eaux superficielles les plus déclassant sur le bassin versant.
L’étude de l’occupation des sols, de la modification des cours d’eau et de leur entretien, et de la gestion de l’ensemble des réseaux, a pour enjeu d’améliorer le fonctionnement hydraulique pour limiter les risques d’inondation. Il s’agit également de protéger les habitations directement menacées, d’envisager les techniques et les mesures contractuelles et consensuelles avec le monde agricole pour la maîtrise et la réduction du ruissellement et de l’érosion des sols. Il faut aussi reconsidérer le rôle de certains espaces telles que les zones humides pour la protection des zones urbaines et pérenniser les cours d’eau non domaniaux tels que la Canche et ses affluents.
Un autre objectif est de protéger durablement cette ressource en eau sur tout le bassin versant. Cela passe par la protection de l’ensemble des captages, la maîtrise des pollutions (qu’elles soient d’origine industrielle ou agricole) et la mise en ’uvre de l’ensemble des dispositifs d’assainissement (collectifs et non collectifs).
Le dernier enjeu est la gestion des milieux aquatiques, liée aux problématiques de ruissellement. Pour cela, nous devons connaître les zones humides et l’ensemble des linéaires de cours d’eau, avec le développement de modes de gestion adaptés. Par ailleurs, le bassin versant est classé en première catégorie piscicole migrateur : c’est un atout qu’il faut préserver et améliorer si possible.
2.2. Des résultats médiocres pour la qualité des eaux de la Ternoise

La qualité globale des eaux superficielles pour la Ternoise, s’est dégradée depuis 2000. Elle est médiocre en amont (qualité 3), mais le secteur en aval est encore en qualité acceptable (qualité 2). L’objectif sur le bassin versant est la qualité 1. Le déclassement est dû au problème de teneur en nitrates, et au problème des matières en suspension. En 2001, la qualité des affluents s’était aussi considérablement dégradée.
L’analyse par paramètres révèle que la qualité 3 apparaît en amont du bassin versant, et principalement sur la Ternoise. En 2002, il y a une amélioration sur la Canche et sur ses affluents. Par contre, la qualité des eaux de la Ternoise demeure médiocre.

2.3. Un outil d’aide à la décision

L’étude sur la Ternoise est un outil d’aide à la décision. L’enjeu est la protection globale de la ressource et de reconquête. C’est aussi une démarche pilote et une référence pour l’ensemble du bassin versant. Ce projet s’inscrit dans la perspective de la Directive cadre européenne sur l’eau (DCE), prenant en compte les paramètres physico-chimiques, biologiques et physiques. Le SAGE sera ainsi porté par des objectifs concrets.

Patrick VERDEVOYE, chargé de mission DIREN Nord - Pas de Calais

La dernière étude globale de la Ternoise a été réalisée par le service régional d’aménagement des eaux en 1978. Plusieurs lignes directrices ont servi à établir le cahier des charges présenté aux différents bureaux d’étude susceptibles de répondre à ce type d’analyses et d’études. Actuellement, il ne subsiste, pour le suivi de la qualité sur la Ternoise, que les points du réseau national de bassin, contrôlés tous les mois pour les analyses physico-chimiques et une fois par an pour les paramètres biologiques.

3. Etablissement du cahier des charges

3.1. Deux objectifs écologiques : état des lieux et détermination des facteurs limitants

Une étude globale de la Ternoise permet d’établir un diagnostic de la qualité écologique de la rivière, qui portera sur la physico-chimie, la biologie et le milieu physique. Les données et les résultats devront contribuer à l’état des lieux demandé par la DCE. Dans la mesure du possible, les diagnostics seront donc établis sur le principe de l’écart à la référence comme il est décrit dans la directive (écart à une station de référence).
Un second but est l’identification des facteurs limitants de la qualité écologique et la proposition d’actions à entreprendre pour satisfaire au bon état écologique prévu par la directive cadre à l’horizon 2015.

3.2. Les neuf stations de contrôle à mettre en place

Il convient de distinguer, pour les stations de mesure proposées, l’approche physico-chimique et biologique d’une part, que l’on peut qualifier de stationnelle, de l’approche de l’étude du milieu physique d’autre part, qui est basée sur l’identification de tronçons homogènes.
Neuf points de contrôle sont envisagés, depuis le secteur des sources jusque la confluence avec la Canche à Hesdin :

 ? la zone des sources, en amont de Saint Michel sur Ternoise, qui devrait être considérée comme une station de référence, puisqu’elle est en principe située en amont des différentes perturbations qui peuvent affecter la rivière.
 ? à l’aval du rejet de la station d’épuration de la ZI de Saint Pol sur Ternoise
 ? à l’aval du rejet de la station d’épuration de la ville de Saint Pol sur Ternoise. Cette station 3 est la station du réseau national des bassins (station 96000), qui est donc suivie une fois par mois pour la physico-chimie et une fois par an pour les paramètres hydrobiologiques
 ? à l’amont de la pisciculture de Monchy Cailleux
 ? à l’aval de cette pisciculture et en amont des ruisseaux d’Eps et du Fossé de Quévaussart
 ? à l’aval des confluences des affluents précités
 ? reprendra la station RNB 97000, qui est située à Auchy les Hesdin
 ? à l’amont de la confluence avec la Canche
 ? station de référence qu’il faudra trouver soit sur la Ternoise elle-même, soit sur l’un de ses affluents ou encore sur un autre affluent de la Canche (le principal étant d’avoir une station de référence se trouvant dans un type de cours d’eau similaire à la Ternoise)

Un ou plusieurs points supplémentaires pourront être ajoutés au vu du découpage de la Ternoise en tronçons homogènes lors de l’application du Système d’évaluation de la qualité (SEQ) physique.

4. Les outils du diagnostic

4.1. Suivi physico-chimique

Le suivi physico-chimique prend en compte les paramètres suivants : mesure de la température de l’eau, de la conductivité, de l’oxygène dissous, du pH, des paramètres qui représentent la matière organique (DBO5 et DCO), les matières en suspension, les éléments qui concernent les différentes formes de l’azote (nitrates, nitrites et ammonium), les éléments qui concernent le phosphore (phosphate et phosphore total), les chlorures, les sulfates et les bicarbonates.

Ensuite, des paramètres concernant les micro polluants sont à prendre en compte. Seuls seront recherchés ceux qui sont susceptibles de se trouver dans la zone d’étude : environ 500 molécules sont utilisées dans les différentes substances en jeu, produits phytosanitaires ou autres. Il n’est donc pas question de rechercher toutes les substances actives, mais seulement celles utilisées sur le bassin versant.

4.2. Suivi biologique
4.2.1. La faune invertébrée

Le premier paramètre concerne les macroinvertébrés benthiques et la seule méthode normalisée dans ce domaine est la méthode de l’Indice biologique global normalisé (IBGN) selon la norme NF T 90-350. Elle est établie par le prélèvement des invertébrés qui sont en place dans les différentes stations et dont l’analyse permet de déduire la qualité biologique de l’eau et des l’habitat.
4.2.2. La flore

Le deuxième paramètre concerne la flore et sera établi à partir du prélèvement et de l’étude des diatomées, par la méthode de l’Indice biologique des diatomées (IBD), norme NF T 90-354. Les diatomées sont des algues microscopiques unicellulaires qui se fixent sur tout type de support. Il s’agit là encore d’une méthode globale, qui permet d’avoir une vision d’intégration de la qualité de l’eau.
L’analyse établie sur les diatomées est plutôt en relation avec la qualité physico-chimique de l’eau (et pas du milieu ou des habitats). A la différence des analyses physico-chimiques où sont mesurés des paramètres (résultat de l’analyse au moment du prélèvement), les invertébrés et les diatomées sont en place : ils subissent toutes les atteintes qui peuvent avoir lieu sur les cours d’eau.
4.2.3. Les macrophytes

Le troisième paramètre du suivi biologique concerne les macrophytes, par la méthode de l’Indice biologique des macrophytes de rivière (IBMR), en cours de normalisation. Il sera demandé au bureau d’études d’approfondir son interprétation avec une approche phytosociologique pour l’interprétation des résultats.
4.2.4. Les poissons

Pour l’étude des poissons, une seule station sera retenue dans le cours inférieur de la Ternoise, avec l’application de la méthode de l’Indice poisson (IP). Cette méthode est également en cours de normalisation. Elle sera complétée par une enquête auprès des associations de pêcheurs en liaison avec la fédération départementale et avec le Conseil supérieur de la pêche (CSP).

4.3. Suivi physique

Le suivi de la qualité du milieu physique passe par un découpage de la rivière en tronçons homogènes. Ce découpage prend en compte la géologie, les variations de pente, les confluences principales, le régime hydrologique du cours d’eau (niveaux de débit, crues), l’état des berges et du lit, ainsi que les rejets. Pour ce suivi, c’est le SEQ physique, version 0’, en cours de validation, qui sera utilisé. Il permettra de définir une classe et un indice de qualité, calculés par rapport à la référence du type physique du cours d’eau évalué.

4.4. Interprétation des données

Le bureau d’étude donnera l’interprétation de l’ensemble des données recueillies et des données existantes (les données des anciennes études, les données et les analyses effectuées dans le cadre des réseaux de surveillance de la qualité des eaux de surface). Une approche globale et interdisciplinaire est prévue dans le contexte de la directive cadre.

4.5. Périodicité des analyses

L’étude porte sur un cycle hydrologique annuel complet. Selon le compartiment de l’écosystème étudié, la fréquence des analyses sera différente. Pour les paramètres de base de la physico-chimie, une analyse sera réalisée mensuellement sur toutes les stations retenues. Pour les micro polluants, un seul passage sera réalisé en fin de période où les micro polluants sont susceptibles d’être présents. Comme il y aura préalablement une enquête pour connaître les substances qui sont utilisées dans le bassin versant, la période où ces substances sont utilisées sera également connue : les analyses seront réalisées à cette période.
Une analyse hydrobiologique aura lieu en juin-juillet pour l’IBGN, une en septembre-octobre pour l’IBD, une en juin pour l’IBMR et une dernière sur la station retenue dans le cours inférieur de la Ternoise pour l’IP.
Pour le milieu physique, un passage sera fait en début d’étude, car si le découpage montre qu’il y a plus de tronçons homogènes que de stations prévues, cela permettra de compléter par des stations supplémentaires dans le reste de l’étude.

Cette étude sera suivie par un comité de pilotage qui sera constitué par les financeurs de l’étude : l’Agence de l’eau Artois Picardie (AEAP), le conseil régional, le syndicat mixte du SAGE de la Canche, les industriels de Saint Pol sur Ternoise, le S3PI, la DRIRE et la DIREN ainsi que la mairie de Saint Pol sur Ternoise et les associations (associations de pêche du bassin de la Ternoise, groupement ornithologique du Nord et groupe naturaliste du Ternois).

5. Echanges avec la salle

Jean PEPIN
Où en est précisément l’état d’avancement du prestataire éventuel ’

Andrée DELRUE (S3PI de l’Artois)
Comme l’a signalé Valérie CHERIGIE, l’étude a fait l’objet de la mise en concurrence de plusieurs bureaux d’étude. Un prestataire a été retenu, avec lequel un certain nombre de points doivent encore être affinés. L’étude devra être lancée fin mai. Cette étude va s’échelonner sur 18 mois, et deux ou trois points d’étape seront faits entre le bureau d’étude et le comité de suivi. L’étude devrait pouvoir être présentée dans les deux années qui suivent au sein du S3PI.

Jacques SWITALSKI (Noeux environnement)
Au niveau du SAGE de la Lys, une commission sur la ressource en eau est apparue assez rapidement, car dans le Béthunois, la ressource en eau est parfois intéressante pour le secteur du Lensois. Cette commission existe-t-elle pour le SAGE de la Canche ?

Valérie CHERIGIE
Il y a bien une commission qui s’intéresse à la gestion qualitative et quantitative de la ressource en eau, dont Maurice LOUF assure la présidence. La synthèse de l’ensemble des données existantes est en cours pour la réalisation d’un état des lieux.

Blanche CASTELAIN (vice-présidente de Nord nature)
Où en est la protection des périmètres de protection autour des captages ? A-t-on a véritablement avancé dans ce domaine ?

Valérie CHERIGIE
C’est principalement la DDE qui pilote ce projet, avec le conseil général.

Dorine ALLART (bureau de l’eau du conseil général du Pas de Calais, direction de l’équipement et de l’aménagement rural)
En ce qui concerne la protection des captages, le programme est piloté par la Mission inter-services de l’eau (MISE) du Pas de Calais, et le conseil général intervient en maîtrise d’ouvrage, laquelle est déléguée pour les communes ou les structures intercommunales intéressées. L’échéance de ce programme est fixée à 2004-2005. A cette échéance, l’ensemble des captages devrait faire l’objet d’une protection.

Synthèse sur l’action régionale de recherche et de réduction des rejets de substances dangereuses dans l’eau par les installations classées

Olivier RAMACKERS DRIRE Douai

La préservation de la qualité de l’eau est l’un des enjeux majeurs de notre société. Cet enjeu est particulièrement difficile à gérer en raison du nombre d’acteurs qui interviennent dans ces rejets, qu’ils soient collectifs, agricoles ou industriels, et qu’ils soient canalisés ou diffus.

1. Les rejets des industriels

Ceux-ci ont, depuis plus de quinze ans, réalisé des réductions significatives sur les polluants les plus classiques (DCO, DBO, MeS, azote). Ces polluants sont aujourd’hui bien connus et les mesures sont publiées par la DRIRE, par l’intermédiaire d’une brochure (l’industrie au regard de l’environnement). La difficulté est qu’il existe des polluants en plus faible quantité, qui sont beaucoup moins connus et néanmoins assez dangereux.
La directive du 23 octobre 2000 précise, dans son article 16, que ces polluants doivent être recherchés. Une liste de 33 familles de substances est à rechercher de manière systématique. Cette directive a été transcrite en droit français, notamment par la circulaire du 4 février 2002. Elle vise à rechercher ces substances dangereuses dans l’eau, rejetées uniquement par les installations classées (le monde agricole et les stations urbaines collectives sont écartés). Il s’agit d’une action de recherche, mais aussi de réduction des rejets de ces substances.
Une action similaire avait déjà été engagée dans les années 90. Cette action a permis de mettre en évidence des substances dans des secteurs insoupçonnés, en particulier l’industrie agroalimentaire. Le ministère de l’Ecologie et du Développement durable (MEDD) a décidé de reconduire cette action par l’intermédiaire de cette circulaire du 4 février 2002, qui va s’étaler sur cinq ans.

2. Le comité de pilotage de la DRIRE

2.1. Composition

Un comité de pilotage régional animé par la DRIRE a été lancé par l’intermédiaire d’une réunion le 3 décembre 2002. Au regard du nombre de personnes présentes, il a été décidé de créer un comité plus restreint et plus opérationnel (à 50 personnes, c’est difficile). Le comité de pilotage régional est constitué de quatre collèges :
 les industriels, très bien représentés dans la mesure où l’action les touche principalement (Chambre régionale de commerce et d’industrie (CRCI), le Mouvement des entreprises de France (MEDEF), l’ACORE et les organisations patronales)
 les représentants des associations de défense de l’environnement (Nord nature, Fédération de pêche).
 les représentants de l’Etat (MISE 59 et 62, DIREN, DRIRE)
 les personnes qualifiées et autres (Agence de l’Eau, Conseil Régional, commission Eau des S3PI et laboratoires de contrôle)

2.2. Les actions du comité restreint
2.2.1. Etablissement du planning prévisionnel

Le comité restreint est composé d’au moins un représentant par collège. Sa mission est d’établir un programme pluriannuel d’actions. Il s’agit principalement de déterminer la période de déroulement : il a été convenu que les trois premières années seraient consacrées aux prélèvements et à l’analyse des substances, et les deux années suivantes à une réflexion sur les mesures à engager pour réduire ces substances. Une liste des installations classées concernées par cette action a été établie, avec trois groupes en fonction des années de prélèvements.
2.2.2. Exploitation des résultats obtenus

Les autres missions sont un suivi de l’action dans le temps et une remontée de cette action au comité national. Concrètement, il sera demandé aux industriels, dans un premier temps, de réaliser une étude des rejets de ces substances, en réalisant un audit préalable permettant de définir les différents points de prélèvements. Les prélèvements seront ensuite réalisés, pendant une période de fonctionnement normale de l’entreprise. L’ensemble de ces informations sera ensuite transmis suivant un rapport cadré, selon un cahier des charges techniques.
2.2.3. Mise en place des actions correctives

Enfin, au delà de la période de cinq ans, la réduction voire l’élimination des substances, ou plus simplement la surveillance plus importante du rejet pourront être envisagés. Le comité de pilotage a décidé que la participation des industriels à cette démarche serait volontaire. La démarche ne sera pas encadrée sur le plan administratif, par la prise d’arrêtés préfectoraux demandant aux industriels de réaliser des prélèvements dans les rejets. La participation volontaire a été votée en comité de pilotage. L’une des conditions était que les organisations patronales soient un relais efficace et utile auprès de leurs adhérents.

L’Agence de l’eau Artois Picardie est partenaire financier de cette action : une aide de 50% pour l’analyse des prélèvements sera donc allouée.

3. Echanges avec la salle

Roger PRUVOST
Il est étonnant que, dans la constitution du comité de pilotage régional, il n’apparaisse pas de représentation des SAGE.

Olivier RAMACKERS
Les SAGE sont un regroupement de structures qui sont, à mon avis, reprises au niveau de la commission. Néanmoins, il n’y a aucune opposition à ce qu’il y ait un représentant des différents SAGE qui participe à ces réunions.

Roger PRUVOST
Lorsque des SAGE sont élaborés, un document opposable est produit. Il est alors tout à fait normal qu’on s’y réfère. C’est la raison pour laquelle il serait bon qu’un ou plusieurs SAGE soient représentés au niveau du comité de pilotage.

Olivier RAMACKERS
En effet, les SAGE sont constitués de différentes entités, et on doit certainement retrouver les membres participant aux différents SAGE au niveau des entités représentatives du comité de pilotage régional. Et si certains SAGE veulent participer à ces réunions, la porte n’est pas du tout fermée.

Roger PRUVOST
Et plus d’un an après la circulaire en date du 4 février 2002, à quel point se trouve la situation ’

Olivier RAMACKERS
Effectivement, la circulaire a été émise il y a déjà assez longtemps. Cependant, une cinquantaine d’acteurs interviennent à ce sujet et ce n’est pas évident de les faire bouger en même temps.
Une liste des industriels concernés par cette action a été établie (plus de 300 aujourd’hui). Le 16 juin, à l’issue du comité régional de pilotage, ces industriels seront invités pour une présentation de l’action. A cette journée seront représentés les différentes entreprises. Le MEDEF interviendra et peut être également la CRCI. Le directeur de l’Agence de l’eau et celui de la DRIRE interviendront également. La planification de l’action est donc bien engagée. Si tout se passe bien, les premiers prélèvements devraient avoir lieu au cours du mois de septembre.

Robert TROUVILLIEZ
Que se passera-t-il si, parmi les 300 industriels, cinq ou dix ne veulent pas participer ?

Olivier RAMACKERS
Nous pouvons proposer au préfet 300 arrêtés complémentaires imposant une recherche des substances. La circulaire du 4 février 2002 privilégiait le volontariat. Néanmoins, ce volontariat reste relativement cadré.
Si, après le délai fixé par cette liste, des industriels rechignent à réaliser leurs prélèvements, le comité passera dans un premier temps par le biais des associations patronales. Celles-ci se sont portées volontaires pour être le relais de leurs adhérents. Si cela n’est pas suffisant, il faudra proposer au préfet un arrêté complémentaire imposant la recherche des substances.

Jacques SWITALSKI
La DRIRE connaît assez bien les rejets des différentes installations classées. La question porte donc plutôt sur les collectivités locales, et notamment sur les stations d’épuration, car dans l’exposé qui a été fait sur la Ternoise, le facteur déclassant était le rejet de la station d’épuration. De qui dépend cette compétence ’

Olivier RAMACKERS
Il s’agit vraiment de substances dangereuses très particulières : on les connaît très mal dans les rejets des industriels. C’est pourquoi cette action est engagée.
Les mêmes types de substances devraient être retrouvées dans les stations d’épuration collectives, et également dans les petits établissements qui ne sont pas des installations classées. Nous nous focalisons évidemment sur les plus gros des 300 industriels et à certains secteurs d’activités pour lesquels cette action est pertinente (traitement de surface, installations mécaniques, textile). Il est clair qu’on devrait retrouver des substances de ce type dans ces secteurs d’activité. Des petits artisans ne sont peut-être pas classés, mais sont néanmoins raccordés à des stations d’épuration collectives et ils doivent malheureusement rejeter des produits qu’on ne devrait pas retrouver dans les égouts.
A ma connaissance, ce comité de pilotage a été complété, dans certaines régions, par un comité de pilotage stations d’épuration. Ce n’est pas le cas dans le Nord - Pas de Calais. Le comité s’intéresse déjà aux installations classées (un problème à part entière). Néanmoins, on est en droit de penser que les acteurs chargés de la surveillance des stations d’épuration collective devraient compléter ce comité. Mais ce n’est pas à la DRIRE de prendre l’initiative.

Roger PRUVOST
C’est une question très importante pour les collectivités locales ayant des stations d’épuration, car cela met en cause la qualité des boues. Connaissant les difficultés rencontrées pour éliminer les boues, compte tenu de ce qu’imposent les industries agroalimentaires, il y aurait intérêt à surveiller de plus près toutes ces entreprises qualifiées de petites industries qui, malgré leur taille, peuvent polluer beaucoup. Il y aurait intérêt à faire une étude dès maintenant et à rechercher toutes ces industries qui envoient leurs rejets dans les stations d’épuration collectives.

Olivier RAMACKERS
Les industriels ne sont pas les seuls à rejeter ces substances : les particuliers peuvent aussi en rejeter. On vise les industriels parce que c’est facile, mais ils ne sont pas les seuls. Les industriels, dont les rejets sont canalisés via une station d’épuration ou directement canalisés dans le milieu naturel, vont être, pour les plus gros d’entre eux, visés par cette action. Je pensais plutôt aux artisans, voire même aux particuliers.

José LAGACHE (président de Verquin environnement)
Sur ce point, on pense essentiellement aux métaux lourds.

Olivier RAMACKERS
Il s’agit effectivement des métaux lourds, mais aussi des pesticides ou des solvants.

José LAGACHE
Je viens de travailler sur les rejets accidentels des particuliers. Une association diffusant parfois une information dans son environnement local, peut-elle disposer facilement d’informations afin de publier un article pour sensibiliser les habitants ?

Olivier RAMACKERS
La réflexion sur la diffusion des informations a déjà été engagée. L’échelle de mesure pour ces substances sera plutôt le microgramme par litre que le milligramme par litre. Il s’agit donc déjà de faire comprendre cette différence aux personnes qui vont lire les articles.
Par ailleurs, les outils de mesure et les normes ne permettent pas pour l’heure d’atteindre le degré de précision souhaité. Un laboratoire a expliqué que l’imprécision sur la mesure chez un industriel sera de l’ordre de 300 ou 400 %. Il faut donc être très prudent sur la diffusion de l’information à l’issue de cette campagne.

José LAGACHE
Je ne pensais pas noyer les lecteurs du journal de l’association avec des chiffres, mais simplement les mettre en garde sur les substances d’utilisation ménagère et sur des rejets à ne pas faire au tout à l’égout. Il peut s’agir de choses très simples, telles que des produits de peinture (les fonds de bidons, par exemple, sont refusés par les déchetteries). Je n’ai jamais eu de réponse sur la destination finale des bidons.

Jacques SWITALSKI
Le beau temps de ces dernières semaines a incité les gens à peindre. Ils sont venus me voir en demandant ce qu’ils pouvaient faire de leurs solvants ou comment ils devaient nettoyer leurs pinceaux. Si la déchetterie ne les prend pas, c’est que la réponse n’existe pas encore. La récupération chez les particuliers n’est pas rentable.

Olivier RAMACKERS
Je n’ai pas de réponse à cette question. Je sais parfaitement de quelle manière éliminer les déchets industriels, mais je ne sais pas ce qu’il en est pour les déchets en petite quantité provenant de particuliers.

Jean-Michel DEVYNCK (directeur adjoint Sotrenor)
Mon unité traite des fonds de bidons provenant des déchetteries tous les jours. Certaines déchetteries acceptent ces produits. La décision de prendre ces produits et d’assurer leur élimination par une filière agréée revient à la déchetterie et à la collectivité. La filière existe bel et bien et ces produits sont éliminés tous les jours chez Sotrenor. Il faut donc insister auprès des collectivités pour mettre en place des containers pour recevoir ces produits.

Présentation du VIIIème Programme de l’Agence de l’eau Artois Picardie

Serge PERDRIX Ingénieur à la direction industrie de l’Agence de l’eau Artois Picardie

Les agences de l’eau sont soumises à un règlement européen sur l’encadrement des aides aux activités économiques, ce qui a été l’occasion en 2002 de revoir tous les financements dans le domaine industriel. Ce dispositif a fait l’objet d’une notification à Bruxelles, pour l’ensemble des agences de l’eau. Chaque agence décide de ses actions selon ses propres spécificités et inscrit ses aides à l’intérieur de ce dispositif.

1. Les économies d’eau

L’étude du résultat de l’action de l’agence sur les 30 dernières années révèle plusieurs tendances : la première courbe représente l’évolution de l’ensemble des prélèvements d’eau dans le bassin (Nord, Pas de Calais, Somme et Picardie), avec une diminution au cours du temps. Cette courbe se décompose en deux sous-courbes : les prélèvements de l’industrie et ceux des collectivités.

L’industrie a fait de gros efforts et a ainsi divisé par trois ses prélèvements. En ce qui concerne les collectivités, il y a une première phase jusqu’en 1985, où les ménages avaient plutôt tendance à augmenter leur consommation en eau. Entre 1995 et 1998, une augmentation forte du prix de l’eau a contraint et amené les ménages à limiter leur consommation. Depuis quelques années, on constate une stagnation du prix de l’eau, ainsi qu’une stagnation de la consommation.
L’agence de l’eau pousse les industriels à réaliser des économies en eau, ou à recycler l’eau qu’ils utilisent, l’objectif étant la stabilisation de la demande totale en eau potable. Les moyens sont des aides financières, qui dépendent du nombre de mètres cubes économisés par jour (prévus dans un projet présenté à l’agence).

2. Le traitement de la pollution dans le cadre des ouvrages de lutte contre la pollution (pollution classique ou toxique)

Aujourd’hui, 250 établissements sont en fonctionnement dans le bassin, ils sont équipés de stations d’épuration et réalisent un traitement complet de leurs effluents. Comment évoluent les investissements, et les frais de fonctionnement des industriels ?

Globalement, les frais de fonctionnement augmentent. Les coûts directs de l’eau pour les industriels correspondent aux coûts de fonctionnement, aux investissements, aux redevances de l’Agence de l’Eau et à la taxe d’assainissement, en cas de raccordement au réseau. Au total, le coût oscille entre 150 et 200 millions d’euros par an.

Une réduction importante des flux de pollution et plus particulièrement des matières oxydables a eu lieu au cours des 30 dernières années (division par 4 de ce type de pollution).Le flux finalement rejeté au milieu naturel est estimé à 70 t/j de Matières oxydables (MO), si l’on considère que 50 % du flux rejeté au réseau rejoint le milieu naturel (rejet des déversoirs d’orage ou des stations d’épuration urbaines). Les flux d’azote ont là encore largement diminué. L’objectif du VIIème programme était de réduire chaque année de dix tonnes de matières oxydables et de une tonne de matières azotées le rejet des industriels au milieu naturel. Ces objectifs ont été atteints.

3. Les rejets des industries par rapport aux autres pollueurs

Du point de vue de l’acceptabilité des pollutions par le milieu naturel, les matières oxydables ne constituent généralement plus le facteur limitant pour les cours d’eau qui n’ont pas encore atteint l’objectif de qualité qui leur est fixé. Ce n’est pas le cas pour l’azote et le phosphore qui sont, dans le domaine des pollutions classiques, des facteurs de dégradation de la qualité physico-chimique.
L’industrie représente encore une part important des rejets en matières organiques. Pour l’azote, elle ne représente plus qu’une part faible par rapport aux autres pollueurs : collectivités et agriculture. Pour le phosphore, la part de l’industrie est également assez faible.
En conclusion, quelques rejets importants subsistent dans le domaine industriel, notamment dans le domaine de l’industrie textile, dont l’une des caractéristiques est d’avoir des rejets de matières oxydables et de DCO dure (c’est à dire qui s’épure difficilement dans le milieu naturel). D’autres secteurs sont également concernés.

4. L’exploitation de ouvrages de lutte contre la pollution

L’agence va maintenant s’intéresser essentiellement aux dysfonctionnements dans les ateliers et dans les ouvrages d’épuration (pollutions accidentelles). Un travail sera également effectué sur l’impact des eaux pluviales, qui peuvent créer des dysfonctionnements des ouvrages, aussi bien industriels que collectifs. Enfin, un travail sera fait dans le domaine des petites pollutions provenant des très petites entreprises et des artisans qui, cumulées, représentent des pollutions assez importantes.

En ce qui concerne le financement et dans le cadre de la notification à Bruxelles, l’Agence de l’eau Artois Picardie limite les financements des travaux aux actions prioritaires. Chaque année, des établissements sont donc pré-sélectionnés pour être financés. Les établissements qui font l’objet d’une mise en demeure portant sur le projet qui est présenté à l’Agence ne peuvent pas être financés. Les montants des investissements éligibles sont limités aux ouvrages ou aux parts d’ouvrages se situant au delà des normes communautaires ou nationales. Relativement floue, cette notion est néanmoins imposée par Bruxelles.
Pour un projet, un plafond d’investissements finançables est calculé. L’objectif est de fiabiliser et d’améliorer la qualité de l’eau, pour permettre au milieu naturel d’atteindre cette qualité. Le plafond de l’investissement finançable est calculé sur le flux de pollution supplémentaire éliminée par le projet. On multiplie les flux obtenus par des taux, par paramètres de pollution (’/kg), ce qui donne les investissements finançables.
Les investissements liés à la lutte contre la pollution toxique ne sont pas plafonnés (le 1er kg rejeté étant à priori nuisible au milieu naturel).
En ce qui concerne le conseil et l’exploitation, il s’agit d’assurer le bon fonctionnement des ouvrages existants (c’est une politique qui existe depuis très longtemps). Cela prend en compte la formation des maîtres d’ouvrage sur le fonctionnement de leur installation. Il y a un souhait d’intégrer, dans ce conseil, le management environnemental, appliqué sur l’ouvrage d’épuration et, pourquoi pas, sur les ateliers eux-mêmes. L’enjeu est d’assurer la maîtrise des pollutions accidentelles et des pointes de pollution. Il s’agit également d’améliorer l’échange de données entre les industriels et les administrations.

Roger PRUVOST
Il est étonnant de voir le degré de pollution, en ce qui concerne les pollutions ménagères par rapport aux pollutions industrielles, en sachant qu’on n’épure pas la même chose. Les chiffres présentés peuvent-ils être considérés comme normaux ou peut-on penser que beaucoup de stations d’épuration n’ont pas les performances suffisantes ?

Serge PERDRIX
La différence entre les stations collectives et les stations industrielles se situe au niveau de la collecte et du traitement de la pollution.
Un industriel collecte bien ses eaux et les traite ensuite selon un dispositif dédié à un type de pollution généralement de qualité constante. On obtient un rendement qui est généralement de l’ordre de 90%. En collectivité, on se situe plutôt autour de 70 à 80% sur la matière organique et de 50% sur l’azote. De plus, tous les flux de pollution raccordés ne sont pas traités dans la station d’épuration.
Effectivement, une part importante (au moins le tiers de la pollution brute) repart au milieu naturel, dans le cadre des déversoirs d’orage. Les effluents sont mélangés et les volumes sont trop importants pour être traités en station urbaine. Les pollutions dues aux collectivités locales sont très préoccupantes et les solutions sont très onéreuses. Indirectement, ce raisonnement pousserait les industriels à traiter eux-mêmes leurs effluents, du fait de leur possibilité de mettre en place un dispositif de traitement efficace.

5. La lutte contre la pollution toxique et l’élimination des déchets dangereux pour l’eau

La lutte contre la pollution toxique est le cheval de bataille du VIIIème programme dans le domaine de la lutte contre les pollutions industrielles.
Il existe aujourd’hui un indicateur de pollution que sont les matières inhibitrices. Il représente la toxicité immédiate de certaines substances chimiques sur les daphnies, des crustacées d’eau douce. C’est un paramètre d’évaluation de la qualité aujourd’hui obsolète. Le flux de MI rejeté a nettement diminué cours des 30 dernières années.

5.1. La pollution toxique : métaux lourds et HAP

Les métaux lourds et les Hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) sont repris dans la directive du 23/10/2000.
Pour les métaux lourds, on trouve dans les sédiments des concentrations jusqu’à neuf fois supérieures au bruit de fond. On ne se fonde pas sur un objectif particulier, car il n’y a pas vraiment d’objectif dans ce domaine précis. On trouve des quantités importantes sur le canal de la Deûle, sur le début du canal d’Aire et sur beaucoup d’avals de cours d’eau (Scarpe amont, affluents de la Lys, Ternoise). C’est là le reflet d’une activité industrielle importante.
La lutte contre les pollutions toxiques a permis une très forte diminution de la toxicité aiguë. Il faut maintenant organiser et intensifier la lutte contre les rejets de substances toxiques à long terme. On s’attaque ici à une problématique très complexe, car on touche à plusieurs notions : la notion de danger, liée à la substance, la notion d’exposition, liée aux conditions du milieu (le temps et la concentration auxquels la substance est en contact avec les organismes vivants).
Il existe une directive cadre, dont il a été question dans les exposés précédents, ainsi qu’un test biologique spécifique pour la toxicité chronique (évaluer les effets d’inhibition sur le vivant à long terme). Pour sélectionner les actions dans le domaine de la pollution toxique (et de la pollution en général), nous travaillons avec des listes d’établissements, pour lesquels l’intérêt de mener une action compte tenu de la situation actuelle et de l’écart de qualité sur le cours d’eau a été évalué.

5.2. Le financement pour le traitement adéquat des déchets toxiques

En ce qui concerne les déchets dangereux pour l’eau produits en grande quantité, une action existait par le passé et va disparaître, en raison de la part des déchets industriels effectivement éliminés (70%) et du rôle très efficace de la police de l’eau, vis-à-vis des établissements soumis à autorisation. L’arrêt des financements a été réalisé à la fin de l’année 2002.
Un autre domaine beaucoup plus intéressant concerne les déchets dangereux pour l’eau en petites quantités. Les producteurs sont les artisans et les particuliers. Les déchets finissent à la poubelle, dans les décharges et aussi probablement dans les réseaux d’eau usée, voire en incinération au fond du jardin ou en décharge interne. Une quarantaine d’activités économiques pouvant générer ces déchets a été recensée.
En ce qui concerne les particuliers, une quarantaine de produits est visée. Les tonnages et les pollutions équivalentes ont été estimés. Actuellement, on considère que seulement 5 à 10% de ces déchets toxiques sont collectés et traités dans les bons centres de traitement. Il s’agira ainsi d’aider des producteurs de moins de 20 tonnes de déchets par an. La subvention correspondra à 50% du surcoût d’élimination. Un appel sera fait à des relais financiers, pour apporter des aides.

6. La résorption des sites et sols pollués

6.1. Classement et surveillance des sites

Dans ce domaine, un inventaire a été réalisé et est présenté dans une base nommée BASIAS. Pour le bassin, ce sont environ 12 000 fiches qui résument l’historique du site potentiellement pollué. Les sites reconnus aujourd’hui comme pollués sont au nombre de 500 et sont repris dans une base appelée BASOL.
En fonction de toutes les études réalisées sur ces sites, il y a plusieurs possibilités : soit le site n’est pas reconnu pollué, soit il est potentiellement pollué, auquel cas un suivi de la qualité par des piézomètres est mis en place, soit il est effectivement reconnu comme pollué, et des actions doivent alors être mises en place. Aujourd’hui, 20% des sites pollués sont surveillés avec des piézomètres et 50 sites menacent les ressources en eau. Tout cela est encadré par une méthodologie nationale très précise.

6.2. Les actions lancées par l’agence de l’eau

170 diagnostics initiaux avec évaluation simplifiée des risques ont été réalisés depuis 1994. Quelques évaluations détaillées des risques préalables aux travaux ont été réalisées. Cela a représenté 1 à 2 millions d’euros par an. Cette action démarre, elle est encore en phase de croissance. Les actions qui restent à mener sont les suivantes : il faut bien identifier les sites qui menacent les ressources, les surveiller (l’agence réfléchit à la création d’un observatoire de bassin pour la surveillance de l’impact des sites pollués sur les nappes), définir et afficher les actions prioritaires (un travail a déjà été fait pour mettre en actions prioritaires des sites pollués), et finalement réaliser les travaux pour quelques actions prioritaires, sachant que les coûts dans ce domaine sont très importants.

6.3. Subventions et participation de l’Europe

En ce qui concerne les participations, c’est le seul point qui, aujourd’hui, n’a pas encore été notifié à Bruxelles. Des choses sont tout de même déjà connues. Il s’agit notamment des participations financières de l’agence aux études simplifiées et détaillées des risques (subvention de 50% des coûts de l’étude). Il y aura également la participation aux études d’ingénierie et aux travaux, pour des subventions qui pourront osciller entre 20 et 80%, dans deux conditions très précises : d’une part si le maître d’ouvrage est public, et d’autre part, s’il ne l’est pas, il faudra qu’il ne puisse pas être appelé à la cause (insolvable).
Quelques points restent aussi à préciser avec l’Europe. Ces points sont toujours en discussion au MEDD. Le premier point concerne le financement des maîtres d’ouvrage privés partiellement solvables (demande forte de la part de l’agence de l’eau).
Il y a ensuite le financement des ouvrages privés qui ne sont pas responsables de la pollution. La responsabilité (ou la non responsabilité) est juridiquement difficile à démontrer.
Enfin, il est proposé que soit instaurée la règle du quitus : abrogation de la responsabilité pour des faits de pollution antérieurs à une date restant à définir.
L’année de référence pourrait être 1976, car à cette époque, il n’y avait pas vraiment de réglementation dans ce domaine.

A propos du volet financier, et en ce qui concerne les prévisions futures, on note une diminution notable du budget alloué à l’industrie.

7. Echanges avec la salle

Blanche CASTELAIN
Pour revenir sur la responsabilité de la pollution, qui est retirée lorsqu’elle date d’avant 1976, cela signifie-t-il que l’industriel n’est plus responsable de la pollution qu’il a produite avant cette date ?

Serge PERDRIX
Le fait est que si cette règle n’existe pas, on risque de se retrouver dans une impasse, avec beaucoup d’industriels qui sont incapables de payer et des pouvoirs publics qui ne sont pas capables de financer. On se dit qu’il est possible d’imaginer que la collectivité ait ses responsabilités, car avant 1976 la réglementation n’était pas véritablement élaborée et on n’avait pas vraiment conscience des conséquences de certains types de pollution. Comme la réglementation n’existait pas ou était sommaire, la responsabilité industrielle peut ainsi être écartée. L’objectif principal de cette règle est surtout de débloquer des situations qui, en cas d’absence de financements publics, pourraient poser problème. Elle vise également à éviter la revente en l’état des sites qui sont des propriétés privées à l’Etat ou a des organismes publics, susceptibles de bénéficier de subventions compte tenu de leur statut.

Blanche CASTELAIN
Est-il possible de se procurer la liste des 50 sites pollués qui menacent les ressources ’

Serge PERDRIX
Il y a effectivement des listes qui recensent un certain nombre de sites. Les bases de données BASIAS et BASOL sont disponibles sur Internet.
Olivier RAMACKERS
La liste des sites BASOL est disponible sur l’Institut de recherches évolutives (IRE).

Serge PERDRIX
Le travail de l’agence est de sélectionner dans cette liste les sites qui posent problème ou risquent de poser problème pour les ressources en eau.

Serge MILVILLE (Association. Citoyenneté 2000)
J’habite Mazingarbe, et il y a dans le secteur peu de ruisseaux. Un seul traverse Mazingarbe : il s’agit du Surgeon, tubé, enterré et bétonné. Tous les égouts s’y déversent et il est ensuite dirigé vers la station d’épuration de la communauté d’agglomération de Lens-Liévin.
Dans le cadre de la lutte contre la pollution, n’est-il pas judicieux de sortir ce ruisseau de son ? sarcophage ? et de lui redonner vie ? En effet, permettre l’infiltration des eaux pourrait peut-être apporter son concours. Si c’était le cas, qui aurait autorité et compétence pour faire cette opération et à qui il faudrait s’adresser pour enclencher la démarche ?

Serge PERDRIX
Pour donner un début de réponse, une démarche similaire a eu lieu sur Valenciennes, avec un cours d’eau qui était tubé sur une partie de Valenciennes. Le collecteur allait à la station d’épuration et récupérait un certain nombre d’eaux, telles que les eaux pluviales, ce qui faisait dysfonctionner la station d’épuration. Un projet est en cours pour séparer le cours d’eau et les eaux usées. Ce n’est pas une réponse à la question, mais il pourrait être intéressant de se rapprocher des acteurs locaux (notamment le SIAV) pour obtenir des informations.

Serge MILVILLE
Qui a autorité et qui peut se permettre de déclencher la démarche, sachant que dans le secteur que parcourt ce cours d’eau, il existe des problèmes d’inondation (école maternelle, caves inondées) ?

Jean PEPIN
La MISE est l’interlocuteur pour un sujet comme celui-ci. Les coordonnées peuvent être obtenues auprès du secrétariat du S3PI.

Jacques SWITALSKI
Je connais un cas similaire à celui de Mazingarbe. Le problème est un problème de cultures, c’est à dire que les cours d’eau étaient entretenus comme les routes. La réponse à ce problème vient d’être donnée en partie. En ce qui concerne l’état des lieux et les déchets dangereux pour l’eau en petites quantités, les cours d’eau servent souvent de lieu d’évacuation des déchets. L’agence de l’eau intervenait, dans le cadre du programme précédent pour aider financièrement les structures intercommunales ou associatives pour l’entretien du cours d’eau. Dans le cadre du VIIIème programme, les aides que l’agence de l’eau donnait pour cela sont-elles reconduites ou non ?

Les documents, remis en séance, sont disponibles sur simple demande

Sigles

CLE - Commission locale de l’eau
CRCI - Chambre régionale de commerce et d’industrie
CSP - Conseil supérieur de la pêche
DCE - Directive cadre européenne
DRIRE - Direction régionale de l’industrie de la recherche et de l’environnement
DIREN - Direction régionale de l’environnement
HAP - Hydrocarbures aromatiques polycycliques
IBD - Indice biologique des diatomées
IBGN - Indice biologique global normalisé
IBMR - Indice biologique des macrophytes de rivière
IP ? Indice poisson
IRE - Institut de recherches évolutives
MEDD ? Ministère de l’Ecologie et du Développement durable
MEDEF - Mouvement des entreprises de France
MISE - Mission inter-services de l’eau
MO ? Matières oxydables
SAGE - Schéma d’aménagement et de gestion des eaux
SEQ - Système d’évaluation de la qualité

Comptes-rendus