Protection des captages d’alimentation en eau potable Béthune

M. Jean PEPIN, Président de la Commission Technique Eau, rappelle en introduction qu’il s’agit de la première réunion sur les 3, prévues pour l’année 2000.
M. Jean PEPIN présente ensuite l’ordre du jour :
 Approbation du compte rendu de la Commission Technique Eau du 20 octobre 99,axée sur les objectifs 2000-2004.
 Les principaux paramètres caractérisant l’eau, présentés par M. Jean-Marie JOURNET (Agence de l’Eau Artois Picardie)
 La protection des captages d’alimentation en eau potable
 l’aspect réglementaire :
par M.Stéphane RIBREUX (Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales)
 la procédure :
par M. Patrice FOURDRINOY (Mission Interservices de l’Eau)
par Mme Anne-Catherine LOMBARD (Conseil Général)
 l’expertise :
par M. Eric CARLIER (Hydrogéologue agréé ? Coordinateur Départemental)
 la situation dans l’Artois :
par M. Patrice FOURDRINOY (Mission Interservices de l’Eau)

Après l’approbation du compte-rendu, M. Jean-Marie JOURNET présente les paramètres, qui caractérisent l’eau.

PARAMETRES DE L’EAU

M. Jean-Marie JOURNET Agence de l’Eau Artois Picardie

M. Jean-Marie JOURNET rappelle que la qualité de l’eau se définit d’abord par des critères basiques, intuitifs et sensoriels tels que l’odeur, la couleur, la limpidité, la température (doc 3).

LES MATIERES ? PHYSIQUES ’

Le premier paramètre de l’eau, essentiel pour les mesures, est l’oxygène dissous (doc 4) ; élément important pour une vie équilibrée et normale dans l’eau comme l’oxygène dans l’air.
Un cours d’eau est une chaîne biologique. La teneur normale, appelée ? saturation ? est de 10 mg/litre à 15’C ; l’eau est alors de très bonne qualité et permet la vie des poissons les plus nobles (la truite, le saumon). A 15’C et avec 5mg/litre d’oxygène dissous, la saturation est de 50% ; elle permet une vie équilibrée mais avec des poissons moins nobles (les poissons blancs). A 3mg/l, la vie dans l’eau est encore possible. Plus l’eau est froide, plus elle contient d’oxygène dissous. L’oxygène dissous varie dans le temps, en fonction de différents paramètres de pollution et de la luminosité.
Dans l’eau de mer, la teneur, exprimée en chlorure, est inférieure ; la saturation est de 8 mg/l à 15’C.

Le second paramètre important est la conductivité (doc 4). Il s’agit de la capacité de l’eau à conduire l’électricité ; elle dépend de la quantité de sel dissous dans l’eau. La valeur normale dans les cours d’eau est de 500 ’S/cm. On peut déduire de la conductivité, la teneur en sel dissous (loi mathématique entre la concentration de sel dissous et la conductivité linéaire : doc 6).
La conductivité est très dépendante de la température, elle varie de 2% par degré centigrade.

Un des paramètres essentiels pour la qualité de l’eau est le pH, potentiel Hydrogène, (acidité/basicité) (doc 4). La valeur normale est 7,5 avec les sels dissous dans l’eau (valeur logarithme) ; 7 dans une eau pure pour la dissociation de l’eau.
Une teneur inférieure à 7 signifie très souvent des fermentations dans l’eau et la génération de substances organiques acides. Quand le pH atteint 8,3 et +, c’est souvent l’indice d’une production végétale excessive. Le pH peut diminuer ou augmenter par l’apport de substances polluantes (des acides ou des bases, comme la soude).

Graphique (doc 5) : Commentaires
Quand l’oxygène dissous augmente (échelle de gauche), le pH augmente également avec des variations différentes (échelle de droite) :
L’oxygène dissous varie de quelques milligrammes/litre.
Le pH varie de quelques dixièmes d’unités pH.
Il s’agit d’un phénomène de photosynthèse :
Le matin, des substances végétales se produisent sous l’effet de la lumière et de nutriments. Cette production végétale induit en sous-produits de l’oxygène dissous et consomme du gaz carbonique, fonction acide (la disparition du gaz carbonique dans l’eau fait augmenter le pH).
La nuit, la production végétale cesse, l’oxygène dissous diminue par le phénomène de respiration des végétaux (consommation d’oxygène et rejet de gaz carbonique). De par la fonction acide du gaz carbonique, le pH diminue.
Ces phénomènes sont classiques dans les cours d’eau, variation de 2 ou 3 mg d’oxygène dissous dans la journée , parfois plus, ce qui peut poser des problèmes d’équilibre biologique

Le dernier paramètre est la turbidité, matières en suspension (doc 4). Les matières en suspension sont celles qui restent sur un filtre fin à 0,3 microns ; elles flottent dans l’eau sans être dissoutes. La teneur normale est de 30 mg/litre, jusqu’à 70 mg/litre, la qualité de l’eau reste convenable.
La turbidité correspond aux mêmes substances, présentes dans l’eau, mais avec des unités et des techniques de mesure différentes. La turbidité se mesure par des flux lumineux transmis ou réfléchis. Plus les matières en suspension sont nombreuses, plus la quantité de lumière diffusée est importante. La turbidité permet de mesurer en continu à l’aide d’une source lumineuse la limpidité de l’eau, alors que les matières en suspension sont mesurées successivement par des opérations de séchage et de filtrage. La turbidité, même si elle n’est pas toujours très bien corrélée avec la mesure des matières en suspension, est recommandable pour contrôler un process industriel ou des rejets.

LES MATIERES ORGANIQUES

La Demande Chimique en Oxygène (DCO) et la Demande Biochimique en Oxygène en 5 jours (DBO5) sont des quantités d’oxygène nécessaires pour dégrader des substances organiques.

Pour la DCO, ce sont des conditions physiques ? violentes ’, avec :
 un oxydant puissant
 un catalyseur pour activer la réaction
 une température élevée 150-160’C
 un milieu acide sulfurique concentré
 une durée de 2 heures
On mesure la quantité d’oxygène nécessaire pour oxyder les matières organiques ; c’est une mesure indirecte.
Pour la DBO5, la quantité d’oxygène nécessaire pour oxyder les matières organiques est aussi mesurée mais avec une méthode plus ? douce ’, standardisée et néo-naturelle dans une étuve à 20’C. Des micro organismes (bactéries) dégradent naturellement, pendant 5 jours, les matières organiques.
La DCO est toujours supérieure à la DBO5 : ce qui peut s’oxyder chimiquement par des méthodes dures ne peut pas toujours s’oxyder facilement et naturellement avec des méthodes biologiques.

Il existe un grand nombre d’oxydabilités. La plus utilisée est l’oxydabilité à froid en 4 heures, en milieu acide, au permanganate de potassium. Les pratiques de l’oxydabilité sont similaires à celles du DCO et du DBO5.

Le Carbone Organique Total (COT) n’est pas une mesure d’oxydabilité comme pour le DBO et le DBO5. Il s’agit d’une mesure du carbone de la matière organique, contenue dans l’eau.
Le carbone minéral de la matière est éliminé pour oxyder, ensuite, le carbone organique.
Deux techniques, plus ou moins agressives, sont possibles :
 soit par ? pyrolyse catalytique ? (dans un four ’
 soit par une méthode photochimique : ? rayonnement ultraviolets ? pour activer la réaction avec un oxydant, tel que le persulfate de sodium
En fonction de la méthode utilisée, les résultats ne sont pas les mêmes , ils dépendent des matières organiques à oxyder.
Pour les deux techniques, il s’agit d’une mesure de carbone organique. La ? totalité ? dépend de l’oxydation des matières en suspension, si toutes les matières en suspension sont oxydées, on peut parler de carbone organique total ; si les matières en suspension n’ont pas eu le temps d’être oxydées, il s’agit de carbone organique dissous. Le COT se prête très bien à des mesures séquentielles, rapprochées ou continues. Il permet de contrôler en permanence la qualité d’eau de process ou de rejets. La DCO demande un processus chimique lourd et difficilement automatisable et la DBO5 est, quant à elle, trop longue.

Remarque :
Les matières organiques en se dégradant consomment de l’oxygène. Le milieu s’épure (? auto-épuration ’), perd de l’oxygène dissous et on assiste, in fine, à une dégradation de la qualité de l’eau. Trop de matières organiques transforment le cycle naturel de vie dans les cours d’eau.

LES MATIERES AZOTEES

 Les nitrates (NO3-)
 Les nitrites (NO2-)
 L’Ammoniac (ou ammoniaque)
 L’Ammonium est la partie de l’azote réduite,
présentée sous la forme d’un sel dissous dans l’eau
 L’azote organique

Ces différentes formes d’azote révèlent la consommation d’oxygène de l’azote : une forme oxydée n’en consomme pas, une forme réduite (y compris les nitrites) en consomme et peut dégrader la qualité de l’eau.
Toutes les formes d’azote sont à l’origine de l ? ? eutrophisation ’, photosynthèse qui s’amplifie. Tant que l’équilibre est respecté, la photosynthèse n’est pas gênante . La production continue de matières vivantes, qui en fin de vie subsistent sous forme de matières minérales dans le milieu et se recyclent par photosynthèse, entraîne un phénomène d’eutrophisation. Cette eutrophisation est susceptible de gérer des masses végétales importantes et de créer des variations importantes d’oxygène.
Le nitrate (NO3-) et les nitrites (NO2-) sont toxiques pour les espèces vivantes
L’ammonium n’est pas toxique, en revanche le gaz ammoniac (NH3) est un poison violent pour la vie piscicole. Quelques dixièmes de milligramme par litre peuvent tuer les poissons.
Plus le pH est élevé, plus l’ammoniac est gênant

Remarque : on peut passer d’une forme d’azote à une autre par oxydoréductions

LES MATIERES PHOSPHOREES

Le phosphore est comme l’azote un nutriment. L’unique présence d’azote dans un cours d’eau ne permet pas de démarrer l’eutrophisation (création de matières vivantes) ; il doit être complété par du phosphore en quantité inférieure à 0,5 mg/litre. Pour résoudre le problème de l’eutrophisation, il faut donc réduire la quantité de phosphore dans l’eau. L’inverse n’est pas réalisable : si l’on supprime l’azote dans les cours d’eau, les algues incapables de s’auto-alimenter en azote meurent et les algues toxiques se développent.

M. Jean PEPIN remercie M. Jean-Marie JOURNET pour ses explications sur les paramètres de l’eau et l’incidence des pollutions sur l’environnement. Il donne ensuite la parole à M. Stéphane RIBREUX (Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales) pour présenter l’aspect réglementaire de la protection des captages en eau potable.

PROTECTION DES CAPTAGES D’ALIMENTATION EN EAU POTABLE

Max THEROUANNE Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales

L’aspect réglementaire :

M. Rainer FLÖRKE (Communauté du Bruaysis) s’interroge sur la nature des pesticides analysés par la D.D.A.S.S.
M. Stéphane RIBREUX précise que la D.D.A.S.S. fait des recherches de pesticides, en plus du programme officiel (Décret N’89-3 du 3 janvier 1989). Elle a ajusté, avec le laboratoire d’analyses le type de molécules recherchées. La plupart des pesticides, recensés dans le Décret, ne sont pas utilisés dans la Région Nord-Pas-de-Calais.

Suite à la question de Mme Blanche CASTELAIN ( Fédération Nord Nature) sur les autres pesticides, M. Stéphane RIBREUX précise que tous les pesticides utilisés ne sont pas connus. La D.D.A.S.S. analyse les pesticides utilisés dans la Région.
M. Stéphane RIBREUX souligne qu’un produit comme la trasine, pesticide fréquemment utilisé, se transforme au cours de son acheminement dans la nappe en sous produits. Le laboratoire a analysé ce produit et s’est aperçu que la trasine disparaît alors que ses produits de dégradation remontent. Jusqu’à présent, l’activité de ces sous-produits n’est pas encore identifiée.

M. Pierre LEMAIRE (Chlorophylle Environnement) s’inquiète de l’apparition de ces nouveaux produits. La méconnaissance de l’activité signifie-t-elle une méconnaissance de la nocivité ?
M. Stéphane RIBREUX répond qu’effectivement, la mise sur le marché d’un pesticide n’est pas précédée par une étude de sa toxicité. Les fabricants de ces pesticides devraient fournir la liste des molécules fabriquées pour que les laboratoires puissent contrôler ces nouveaux produits et rechercher les produits de dégradation ainsi que leur toxicité.

M. Pierre LEMAIRE (Chlorophylle Environnement) demande si le taux de 0,5 ’g/l autorisé pour l’ensemble des pesticides est régulièrement dépassé dans les analyses réalisées.
Dans la Région Nord-Pas-de-Calais, le 0,5 ’g/l n’a pas été récemment dépassé. Certains dépassements ont eu lieu mais pas sur des forages qui alimentent de grandes unités. Les résultats sur les pesticides ne sont pas représentatifs puisque l’ensemble des forages n’est pas suivi ; les analyses de pesticides sont onéreuses et ne sont pas prévues par la réglementation, par conséquent les sites analysés sont sélectionnés.

Mme Blanche CASTELAIN interroge M. Stéphane RIBREUX sur la possibilité d’effectuer des analyses mensuelles et sur les méthode de ciblage ?
Il existe 450 forages dans le Nord-Pas-de-Calais. Une analyse mensuelle nécessite plus de crédits.

On les cible selon différents critères :
 des analyses ont déjà été effectuées quelques années auparavant et avaient révélé la présence de pesticides
 le forage alimente de grandes agglomérations
 le forage est dans un secteur sensible à cause des nitrates
 des forages dont les débits sont inférieurs à 100m3/jour
Dans la réglementation, il est prévu pour ces forages, une analyse dès leur ouverture et des analyses partielles par la suite.

M. Yvan DRUON (Conseiller Général et Maire de Harnes) demande si ces 450 forages comprennent également les forages individuels.
M. Stéphane RIBREUX précise qu’il ne s’agit que des forages du Département qui alimentent la population en eaux potable.
M. Pierre LEMAIRE souhaite des précisions sur le nombre de forages analysés chaque année pour la recherche de pesticides.
En 1999, 90 forages ont été analysés deux fois/an en fonction des périodes d’épandage des produits. En cas de pluie, la trasine répandue sur le champ s’infiltre rapidement dans la nappe. Des campagnes mensuelles ont également été réalisées sur 6 points du Départements, en particulier sur des grandes unités.

M.Michel THOMAS (Président du G.I.Q.A.E.) s’interroge sur les facteurs générant le plus de nitrates.
M. Stéphane RIBREUX indique que plusieurs facteurs peuvent être à l’origine de la pollution par les nitrates :
 l’utilisation abusive ou excessive d’engrais agricoles
 les rejets sauvages d’eaux usées dans un milieu fragile (infiltration préférentielle vers la nappe)
 le passé historique industriel d’une Région (fabrication d’engrais et contamination des sols)
Dans certains Départements ou secteurs, les nappes sont captives et sont dénitratées, lorsque la nappe est libre, c’est l’inverse.

M. Pierre LEMAIRE rappelle que dans la Région Nord-Pas-de-Calais, il manque 15000 emplois dans la Fonction Publique par rapport à une moyenne nationale. Les difficultés de réalisation des analyses sont-elles liées à ce déséquilibre ?
M. Stéphane RIBREUX souligne qu’il s’agit, en réalité de questions financières et non pas d’effectif. l’Etat n’a pas prévu de moyens financiers pour les analyses ; les prélèvements peuvent être réalisés sans trop de difficultés. Lorsque la D.D.A.S.S. réalise des analyses dans le cadre du contrôle sanitaire et réglementaire, elles sont payées par le Distributeur ; les analyses de suivi sont, quant à elles, prélevées sur le budget Etat. Les analyses de pesticides ne peuvent pas être payées par les distributeurs sauf si l’on a trouvé des teneurs en pesticides dépassant la norme.

M. Pierre LEMAIRE note que la Direction Régionale de Affaires Culturelles (D.R.A.C), reçoit de l’Etat, 6,4% du budget national pour 8,3% de la population nationale dans le Nord-Pas-de-Calais. Il souhaite savoir s’il s’agit pour la D.D.A.S.S. de la même déflation.
M. Max THEROUANNE (Ingénieur Sanitaire D.D.A.S.S.) ajoute que la D.D.A.S.S. n’effectue pas uniquement le contrôle sanitaire des eaux, elle contrôle également les eaux de distribution publique, les piscines, les eaux de mer, ?
Le contrôle sanitaire des eaux représente ? presque 1/3 du fonctionnement du service. L’objectif est de réaliser les contrôles sanitaires réglementaires - et dans la mesure du possible, les contrôles complémentaires (pesticides, réseaux patrimoniaux) - avec des crédits Agence de l’Eau et avec l’aide d’objecteurs de conscience
M. Jean-Marie JOURNET précise que dans le Nord-Pas-de-Calais, les montants attribués à la connaissance des milieux et des ressources en eaux souterraines sont très nettement supérieurs à certaines autres régions. Le réseau patrimonial comporte environ 60 points par Département, soit 4 fois plus que dans le reste de la France. La D.D.A.S.S. n’a pas actuellement les moyens d’imposer la surveillance de paramètres élaborés pour de petites unités de distribution et pour 450 ouvrages de distribution.

M. Yvan DRUON souhaite consulter les données des ouvrages
M. Jean-Marie JOURNET propose de les joindre au compte-rendu ; il précise que 60 ouvrages, suivis 2 fois/an, représentent une densité supérieure aux recommandations du Ministère de l’Environnement.

Mme Blanche CASTELAIN demande quelques précisions sur le fluor.
Le fluor touche essentiellement 1 voire 2 captages dans le Département, il s’agit de Laventie et Saint-Venant. Après avis médical, on conseille de réaliser une complémentation au fluor de la population.

M. Michel THOMAS souhaite savoir si l’on sait traiter les nitrates.
Les nitrates peuvent être traité ; en revanche le fluor n’est pas traitable.

M. Pierre LEMAIRE demande une évaluation des coûts pour l’analyse spécifique d’un pesticide.
Une recherche de trasine, de ses dérivés et des urées substituées représente un coût de 1500 F.

M. François VANDENBON souhaite connaître le coût pour une analyse complète de l’ensemble des paramètres évoqués, y compris les métaux lourds ?
Il s’agit alors de l’analyse type CEE, réalisée pour le démarrage d’un forage. Elle coûte environ 12 000 F et est payée par le distributeur. Une analyse, programmée chaque année, aurait des répercussions sur le prix de l’eau.
M. Jean PEPIN souligne que 12 000 F, c’est important pour des analyses mais cela représente peu pour une eau de qualité.
La D.D.A.S.S. réalise 7000 analyses par an, pour de grandes unités de distribution. Elle intervient 5 fois/mois pour la distribution, le forage, l’unité de traitement. Ce volume d’analyses est payé par le distributeur. La D.D.A.S.S. ne peut pas imposer au distributeur d’augmenter la fréquence d’analyse, elle-même imposée par le Décret.

M. Jean PEPIN remarque que la réglementation est appliquée mais est- elle suffisante ?
M. Stéphane RIBREUX précise que le programme officiel de contrôle sanitaire, fixé par le Décret 89-3, est respecté dans le Département. Il fixe des quotas minima à respecter pour évaluer la protection de la santé publique.
M. Jean-Marie JOURNET ajoute que l’Agence finance des mesures complémentaires à la Réglementation, soit environ 200 à 300 000f/an.

M. Bertrand SIX (Fédération Nord Nature) demande si des problèmes avec des canalisations en plomb avant compteur persistent ?

M. Stéphane RIBREUX rappelle que dans le Département, on a peu de canalisations en plomb et les eaux sont peu agressives. Un dépôt naturel de calcaire, déposé dans les canalisations, protège l’eau. Il existe encore des canalisations en plomb après compteur, en revanche il en reste très peu avant compteur.
M. Max THEROUANNE ajoute que la réglementation va être durcie : des 50 ’g/l actuellement, elle va passer à 10 ’g/l.
A partir de cette réduction, il faudra être plus vigilant en fonction des responsabilités :
Avant compteur (compteur inclus), le distributeur d’eau est responsable
Au delà du compteur, la collectivité est responsable

M. Yvan DRUON s’interroge sur les désordres dans l’eau, souvent attribués à l’activité économique et aux zones abandonnées par l’activité économique. Les dégradations sont payées par les consommateurs et non pas par les contribuables, quelque soient leurs ressources. Il arrive parfois que le service public national rétablisse cet équilibre pour les besoins fondamentaux. Existe-t-il des moyens de compensation, par exemple le financement et les initiatives de l’Agence de l’Eau, pour rétablir ce déséquilibre financier ?

M. Stéphane RIBREUX rappelle la difficulté pour l’Etat de prendre des mesures pour améliorer la qualité de l’eau. Son rôle est d’assurer la protection de la santé publique. L’Agence de l’Eau finance parfois les nouvelles recherches mais elle n’intervient pas pour les compensations financières des consommateurs.

M. Jean-Marie JOURNET précise qu’un Fond National de Solidarité pour l’Eau vient d’être créé par le Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement pour agir et assumer une politique d’environnement. Il s’approvisionne actuellement sur une partie du budget des Agences et est destiné (entre autres) à assurer un équilibre entre les consommateurs. Une partie de ce budget pourrait être attribuée au contrôle de l’eau potable ; cette demande peut être transmise au Ministère par le biais des DIREN.

M. Jean PEPIN propose à M. Stéphane RIBREUX de poursuivre sa présentation de la réglementation sur les périmètres de protection (doc 28 à 36).
Remarque : ces périmètres visent à protéger les 450 forages de la région.

La procédure :

M. Jean PEPIN donne la parole à M. Patrice FOURDRINOY (Missions Interservices de l’Eau) puis à Mme Anne-Catherine LOMBARD (Conseil Général).
M. Patrice FOURDRINOY, Responsable de la cellule ? Réglementation des eaux souterraines ? de la Direction Départementale de l’Agriculture et de la Forêt , a pour principale mission d’appliquer la loi sur l’eau pour les eaux souterraines (rejets soumis à infiltration, instruction des dossiers des périmètres de protection des captages d’eau potable).
La procédure comprend 3 phases pour une durée de 3 à 4 ans (doc 39 à 47)
 Etat de lieux, diagnostic, consultation administrative : durée de 2 ans
 Enquête publique : durée de 18 mois
 Délibération du Préfet dès la clôture de l’enquête : délai de 1 an

3 enjeux de l’enquête publique :
 mesurer les enjeux sanitaires : la Déclaration d’utilité publique
 évaluer les impacts du prélèvements d’eau potable (qualité, quantité)
 respect de la propriété : identifier les propriétaires, préserver les droits des tiers

Mme Blanche CASTELAIN souhaite savoir combien ont fait l’objet de périmètres de protection, sur les 450 forages recensés.
M. Patrice FOURDRINOY recense 517 forages dont 450 exploités au titre de l’eau potable.
112 sont protégés, 234 sont en cours de procédure pour être protégés et 171 n’ont pas engagés de procédures de protection.
Mme Blanche CASTELAIN : que fait-on pour ces 171 forages ’
M. Patrice FOURDRINOY souligne que les collectivités en sont responsables ; seule une douzaine de dossiers par an peut être instruite. Chacun peut déposer un dossier d’instruction : la phase préliminaire étant réalisée soit par la collectivité elle-même, soit par un bureau d’étude spécialisé, soit par la maîtrise d’ouvrage déléguée. L’administration ne peut instruire que 12 dossiers par an. La durée de l’instruction est identique pour un forage de 50 habitants ou 50 000 habitants ; la priorité actuelle est donc donnée aux forages plus grands, de 100 000 à 500 000 habitants.
M. Max THEROUANNE ajoute qu’il s’agit de périmètres de protection qui font l’objet d’arrêté préfectoral et d’une déclaration d’utilité publique ; c’est donc opposable au tiers.
Des rapports hydrogéologiques ont été réalisés dans les années 70, à partir desquels sont évalués certains projets à proximité de captages d’eau potable. Certains forages ne sont pas en cours de procédures car ils ne sont pas protégeables de par une activité économique très dense.
M. Patrice FOURDRINOY précise que sur le plan inter-administratif, le principe de précaution est appliqué pour tous les forages qui disposent d’un rapport d’hydrogéologues agréés.

M. Jacques GOHIER (Association pour la sauvegarde des Puits Artésiens) interroge M. Eric CARLIER sur la détermination des périmètres de protection en zone urbaine.
M. Eric CARLIER (Hydrogéologue agréé) souligne l’importance du contexte géologique.
1er exemple : avec une couverture argileuse imperméable, protectrice de 30 mètres et la craie sous l’argile, les risques de pollution superficielle de la nappe sont quasiment nuls. Des périmètres de protection pourraient donc être instaurés autour de ces captages en milieu urbain, avec des contraintes très minimes :
Interdiction des excavations à la craie
Interdiction des stockages de produits radioactifs
Interdiction de mise en place de décharge

2ème exemple :même caractéristique du sol que précédemment mais sans protection argileuse : craie subaffleurante et quelques décimètres de limon, le filtre est donc limité.
De nombreux forages ne son pas protégeables et l’hydrogéologue agréé demande la fermeture de ces forages. L’année dernière dans le Pas-de-Calais des captages à forts débits ont été fermés suite à la demande de l’hydrogéologue agréé.

M. Jacques GOHIER rappelle que plusieurs forages ont été réalisés par les anglais pour alimenter les campements pendant la guerre 14-18. Dans une zone urbaine, même avec une couche d’argile de 30 mètres, on ne peut pas être sûr d’avoir un forage abandonné qui n’a jamais été bouché.
M. Eric CARLIER reconnaît que de nombreux forages ne sont pas recensés et peuvent effectivement constituer des sources de pollution potentielle
M. Yvan DRUON évoque le manque d’eau potable dans le bassin minier alors qu’il contient de l’eau mais pas utilisable. Quelles précautions peuvent être prises pour les captages à long terme ?
M.Eric CARLIER note que si un captage présente des substances susceptibles de porter atteinte à la santé publique, l’hydrogéologue agréé va émettre un avis négatif dans son rapport, sur l’utilisation de l’eau de ce captage à des fins d’alimentation de la population. Dans le bassin minier, les quantités d’eau sont importantes mais les nitrates posent problème. Le bassin minier possède effectivement une grande quantité d’eau mais pas toujours de qualité. Des études ont été faites pour l’exploitation de la craie (proche de la problématique de la dénitrification), sur le Nord de l’Artois. La quantité d’eau sur le sud présente des pollutions par les nitrates ou par les hydrocarbures ; ce qui n’empêche pas de prévoir des politiques de traitement de ces eaux.
La mise en place de périmètres de protection, même pour les eaux contenant 80 mg/litre de nitrates impropres à la consommation, permettrait la reconquête de ces eaux à long terme (30 à 50 ans).
Mais actuellement aucune réglementation officielle ne prévoit pas la protection des captages pollués.

M. Yvan DRUON s’interroge sur le devenir de l’eau et sur la responsabilité de réguler et de définir une politique à long terme de préservation de l’eau.
M. Eric CARLIER souligne qu’il s’agit d’un problème politique. Le troisième millénaire se caractérisera par une prise de conscience sur l’eau et la gestion de cette richesse. Actuellement aucun décret, aucune loi ne légifère le devenir d’un captage pollué ; la solution actuelle est de le fermer.
M. Patrice FOURDRINOY ajoute que la mise en place des SAGE (Schémas d’Aménagement et de Gestion de l’Eau) devrait permettre e réfléchir sur le devenir de l’eau, ses usages et les priorités.
M. Eric CARLIER précise que des solutions techniques peuvent dès aujourd’hui être apportées en attendant une amélioration de la politique en matière d’eau souterraine : une eau polluée par les nitrates peut, par exemple, être utilisée à des fins industrielles.
Pour les eaux superficielles, il existe une politique concrète de reconquête de qualité ; l’Agence de l’Eau a établi une carte d’objectifs de qualité des cours d’eau. Pour les eaux souterraines, aucune réponse juridique ne peut être donnée actuellement.

Mme Anne-Catherine LOMBARD (Conseil Général) rappelle que les périmètres de protection ont un rôle limité à l’égard de toutes les pollutions. Par exemple, ils ne peuvent en aucun cas lutter contre la pollution diffuse, notamment le nitrate qui dépasse largement le cadre des périmètres de protection. Les périmètres de protection sont mis en place contre les pollutions bactériologiques et ponctuelles, à proximité du site de prélèvement. Les pollutions de bassins versants se traitent en amont par les SAGE. Mme Anne-Catherine LOMBARD rappelle que chaque situation est différente selon les départements, non pas par sa procédure puisque le même texte de loi est appliqué dans chaque département mais par les interlocuteurs :
 les services instructeurs sont la DAF dans le Pas-de-Calais, la D.D.A.S.S. dans la Somme et la DDE dans le Nord, ?
 la maîtrise d’ouvrage déléguée est réalisée dans le Pas-de-Calais par le Conseil Général mais elle n’est pas obligatoire (dans le Nord elle n’a pas été faite).
Dans le Département du Pas-de-Calais, la majorité des communes ont sollicité la maîtrise d’ouvrage déléguée du Conseil Général pour un appui technique, les grandes collectivités peuvent néanmoins choisir de faire la maîtrise d’ouvrage sans la maîtrise d’ouvrage déléguée du Conseil Général.

Sur 235 procédures en cours, environ 200 sont suivies par le Conseil Général. Les différentes étapes sont les suivantes :
 Programmation annuelle des dossiers, en fonction des arrivées, puis appel d’offres auprès des bureaux d’études qui vont réaliser les dossiers, longs et complexes, pour la collectivité distributrices.
Aspect financier : autant de cas particuliers que de départements
Dans le Pas-de-Calais, les collectivités peuvent prétendre au minimum de subventions, soit 70% par l’Agence de l’Eau, le maximum étant de 85%. Le Conseil Général intervient entre 0 et 15% selon la taille de la collectivité (la participation étant plus importante pour les petites collectivités). Le taux maximum atteint seulement 40% dans certains départements du sud de la France.
Une procédure pour un petit captage coûte, en moyenne, 80 000 F HT.

 L’hydrogéologue, dans le cadre de sa procédure, prescrit des travaux à réaliser sur le site du forage (clôtures, étanchéité’).
La procédure de mise en place des périmètres de protection est l’occasion de faire un point sur un site de prélèvements analysés uniquement pour son ouverture. La majorité des petits captages ont été créés dans les années 20-30. Ce bilan quantitatif et qualitatif permet d’évaluer le montant des travaux. Si les travaux sont trop onéreux, la protection peut ne pas être appliquée. Cette procédure est très longue (4 ans ) avec de nombreux intervenants.
Bien souvent, depuis la création des captages, l’activité économique s’est développée aux alentours (urbanisation, corps d’exploitation, infrastructures’) et gêne la protection des sites. C’est pourquoi, lors de la réalisation d’un forage, un hydrogéologue agréé est désigné. Il donne son avis sur la protection du site pour éviter les conflits et les pollutions autres que l’agriculture. Notre département se caractérise par une forte urbanisation et chaque protection se traduit par des difficultés supplémentaires.

Il s’agit également d’une procédure évolutive (les prescriptions des hydrogéologues évoluent). La construction des habitations par exemple était réglementée avant les années 90, aujourd’hui pour la majorité des captages, elle est strictement interdite. La protection des captages évolue en même temps que la procédure appliquée.
Les 120 captages protégés ne sont pas toujours suivis par les collectivités, responsables de l’application de l’arrêté ; la procédure de périmètre doit encore se poursuivre après la publication de l’hypothèque. C’est pourquoi le Conseil Général a recruté un technicien pour aider les collectivités à appliquer l’arrêté et veiller à la protection de la ressource.

M. Jean PEPIN remercie Mme Anne-Catherine LOMBARD pour son intervention et propose, à M. Eric CARLIER de présenter l’étape de l’expertise.

L’expertise :

M. Eric CARLIER précise les missions et les domaines d’investigations des hydrogéologues agréés. Le Pas-de-Calais compte 8 hydrogéologues dont 1 coordonnateur départemental.
Le rôle du coordonnateur est de proposer au Préfet ou aux services de l’Etat qui le représente (la D.D.A.S.S. pour le Pas-de-Calais) un hydrogéologue agréé qui sera ensuite officiellement désigné par Arrêté Préfectoral.
M. Eric CARLIER rappelle que chaque hydrogéoloque agréé dépend du Ministère de la Santé et, après désignation du Préfet, intervient sur un dossier après désignation du Préfet, parallèlement à sa fonction principale.

Les hydrogéologues agréés ne réalisent pas d’étude. Ils interviennent pour émettre un avis sur un projet technique, réalisé par un bureau d’étude extérieur.
Ils sont consultés pour :
 la création et la protection de captages d’alimentation en eau potable
 la création de forages industriels
 le dispositif de recueil et de traitement des eaux de chaussées, d’autoroutes et de routes nationales
 le réseau d’assainissement en milieu rural et la technique de l’assainissement (semi collectif, collectif, autonome)
 l’aménagement ou la réhabilitation de centres d’enfouissement technique
 les dispositifs de surveillance des eaux souterraines, par exemple pour des friches industrielles (emplacement de piézomètres : mesures pour évaluer les impacts de la friche industrielle sur la qualité des eaux souterraines)
 la création de cimetières

A la suite de cette consultation, l’hydrogéologue agréé rédige un rapport et le transmet au demandeur ainsi qu’aux services de l’Etat représentant le Préfet. L’avis de l’hydrogéologue peut ne pas être suivi.
Pour la protection des captages, l’hydrogéologue propose les périmètres de protection en fonction du débit pompé et les prescriptions relatives aux périmètres.

M. Jean PEPIN remercie les participants de cette Commission Technique. Il précise que la présentation de l’expertise et des ressources sera complétée par M. Eric CARLIER, lors de la prochaine réunion de la Commission Technique Eau et qu’elle sera suivie de la visite d’un captage.

Comptes-rendus